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Les pathologies dentaires de l’Octodon degus sont l’une des causes les plus fréquentes d’un rendez-vous chez le vétérinaire. À ce jour, plus de 60% des consultations pour un octodon concernent une maladie dentaire. La plus connue est la malocclusion, bien qu’elle ne soit pas la seule, car ils peuvent développer d’autres pathologies dentaires. À partir de 2 ans, 76% de ces rongeurs ont des problèmes de dent1. Des chercheurs vétérinaires ont découvert que l’octodon avait un fort besoin de calcium dans son alimentation2. Or, la plupart des mélanges proposés en animalerie ne sont pas adaptés aux nécessités de ces rongeurs3. De plus, il est indispensable pour l’octodon d’avoir une bonne usure des dents. Celle-ci passe alors par la mastication, et donc par la mise en place d’une alimentation saine, avec des plantes fraîches et du foin à disposition en permanence4.

Illustration par a morning coffee
La dentition chez l’Octodon degus
Croissance des dents

Apparition des prémolaires et molaires durant les premiers jours de l’octodon. (Vladimir Jek)
S’il est pourvu à la naissance d’incisives fonctionnelles, le degu acquiert ses prémolaires et molaires en quelques jours. C’est la mâchoire maxillaire qui développe en premier la dentition, avec une éruption des couronnes des prémolaires et molaires en 2 à 5 jours après la mise bas. Ce n’est qu’après 10 jours que ces couronnes sont entièrement efficaces. Ainsi, les jeunes octodons seront capables de s’alimenter vers l’âge de 8 jours5. Cependant, ce n’est qu’autour des 30 à 40 premiers jours que les prémolaires et molaires émergent réellement, pour être totalement fonctionnelles au bout des 72 jours après la naissance. Cela correspond également avec l’âge du sevrage. Enfin, contrairement à une rumeur tenace, il est très probable que l’Octodon degus ne présente aucune dent de lait6 ou qu’il les perde durant la gestion de leur mère. Pour le moment, il n’est pas possible d’affirmer la présence de dents de lait chez l’octodon.
Anatomie

Molaires et prémolaires chez l’Octodon degus
Les dents de l’Octodon degus sont dépourvues de racines, avec de hautes couronnes, appelées hypsodonte. Leur croissance est continue7, d’où l’importance d’une bonne mastication chez les degus4. Ils disposent ainsi de 20 dents, dont la formule dentaire est : I1, C0, P1, M3. Cela veut dire qu’ils ont deux paires d’incisives, deux de prémolaires et 3 paires de molaires. Ces caractéristiques dentaires sont par ailleurs partagées par tous les rongeurs du sous-ordre Hystricomorpha, comme les chinchillas ou les cochons d’Inde.
Les octodons ont deux paires d’incisives, qui sont visibles et naturellement colorées en jaune / orangé sur la face externe. Elles sont séparées des prémolaires et molaires par une cavité grande cavité vide, le diastème. L’émail des incisives n’est présent que sur la face orangée et sur les bords, et leur physiologie rendant ces dents très résistantes à l’usure. Les couronnes sont la partie de la dent située sous la gencive et dans l’alvéole, c’est en quelque sorte “l’attache” de la dent. La partie au-dessus du bord gingival, et donc visible, est appelée la couronne clinique. Enfin, on retrouve les prémolaires et molaires au fond de la bouche, qui servent à la mastication poussée et, en cas de problèmes, peuvent créer des malocclusions.
Entretien et mastication
Du fait de son régime naturel strictement herbivore, l’Octodon degus mange des végétaux assez pauvres en énergie. Il lui faut donc manger une grande quantité de végétaux pour pouvoir subvenir à ses besoins. Cela implique un travail de mastication long et minutieux, qui permet la bonne usure des dents. Les incisives et les autres dents jouent un rôle séparé lors des repas. En effet, pour mâcher correctement, les incisives fonctionnent de haut en bas, alors que le mâchement avec les prémolaires et molaires se fait de gauche à droite. Ces deux mastications “isolées” rendent rare une double malocclusion dentaire dans la nature. Cependant, en captivité, les doubles malocclusions sont assez courantes. Les rongeurs du sous-ordre Hystricomorpha présentent une anatomie musculaire et articulaire spécifique au niveau des mandibules, leur permettant de mastiquer et ronger de manière assez puissante.
Mécanismes des maladies dentaires
Les pathologies dentaires, et notamment la malocclusion dentaire est l’une des pathologies les plus communes chez les octodons. Jusqu’à 76% des octodons vus en cabinet vétérinaire seront diagnostiqués avec un problème dentaire17. De plus, elles sont parfois “masquées” par d’autres maladies, comme des affections respiratoires, qui sont en réalité des conséquences de malocclusion. Mais si l’octodon est aussi enclin à ce genre de pathologies, c’est que son alimentation n’est bien souvent pas adaptée. L’octodon est principalement sujet à des malocclusions dentaires, mais ce ne sont pas les seules pathologies dentaires qu’il peut développer. Les caries ou autres infections sont courantes et rarement détectées4. Celles-ci peuvent dégénérer notamment en odontome8, masse non cancéreuse, mais qui peux empêcher le degu de manger ou respirer, lié aux frottements à répétition.
Les pathologies dentaires sont souvent très douloureuses pour le rongeur, et peuvent induire de nombreux autres problèmes de santé, notamment l’arrêt du transit intestinal9. Or, chez l’octodon comme chez beaucoup de petits mammifères, il est indispensable que le transit reste stable, car le degu mange toute la journée. Mais le transit est loin d’être le seul impacté. La vue, l’ouïe, l’odorat peuvent être atteints, par diverses manières, à des degrés plus ou moins graves. Ceci engendre également de la douleur et du stress, pouvant causer d’autres pathologies. Il s’agit d’un cycle sans fin, qui donnera naissance à des douleurs et du stress chronique.
Causes
Alimentation
Dans la nature, l’octodon passe la plupart de ses journées à l’extérieur, à rechercher de la nourriture. Son alimentation est principalement constituée des plantes (tiges, feuilles) et durant les saisons sèches, des apports en grains10. Grâce à la mastication de ces végétaux, l’octodon use spontanément ses prémolaires et molaires tout au long de la journée. En mangeant des graines, cosse ou des écorces, il use également ses incisives. De par son alimentation, mais aussi son exposition au soleil, l’octodon produira assez de vitamine D, dont le rôle est primordial pour la bonne pousse des dents11.
Ces deux types de mastications sont complémentaires et doivent être proposés en captivité. Si le degu a naturellement tendance à ronger dans sa cage, souvent par ennui, c’est la mastication qui pose le plus souvent problème. Le foin joue alors un rôle très important, mais bien souvent le degu refuse d’en manger en quantité suffisante. Cela est souvent dû à une alimentation trop riche et proposée en permanence à l’octodon12. Pour cela, nous vous invitons à consulter notre article à ce sujet : Mon octodon refuse de manger son foin.

Brindille, par Dessine-moi une branche
L’alimentation est le premier déclencheur de pathologies dentaires chez l’octodon13. Il convient donc d’apporter à l’octodon une alimentation saine, composée d’un maximum de 20% de graines9, ce qui correspond à sa consommation moyenne sur une année dans la nature, et de 80% de végétaux2. Cette alimentation permet d’apporter d’une part un taux de Calcium:Phosphore élevé, d’au moins 1,6:23 pour une bonne pousse des dents, mais propose aussi une mastication plus saine. Les granulés, de par leur forme et leur compression, ne permettent pas à l’animal de manger toute la journée. De plus, bien souvent, sa composition est inadaptée aux besoins de degu, car trop riche. Le degu va alors sélectionner sa nourriture et refuser de manger des aliments plus pauvres en sucre ou graisses. L’apport important en Calcium est indispensable à l’octodon, contrairement à d’autres rongeurs, pour une dentition saine. Enfin, grâce à l’apport pauvre en énergie, le degu aura un poids optimal. Une équipe vétérinaire a ainsi mis au point un régime adapté à l’Octodon degus, le SAB degu Mix. Un apport régulier en vitamine D est également essentiel pour la bonne santé des degus14. Pour en savoir plus, vous pouvez lire notre article sur le sujet : Comment nourrir son octodon ? SAB degu mix.
Autres causes
Mazu, octodon dont les dents poussent à travers son crâne et touche le globe oculaire, qui ne peut être opéré.
Si l’alimentation joue un rôle primordial dans les pathologies dentaires, il est possible que ces dernières aient d’autres causes14 :
- Condition d’hébergement : le manque d’exposition à la lumière ou le manque d’apport en UV induit un déficit en vitamine D3, entraînant plusieurs pathologies, dont les problèmes dentaires.
- Maladies osseuses métaboliques : il s’agit d’une fragilité des os et des dents, qui est retrouvée chez de nombreux rongeurs et pourrait exister chez l’Octodon degus.
- Défaut chronique d’usure des dents : généralement induit par une alimentation composée uniquement de granulés, ne permettant pas une longue mastication13.
- Prédisposition génétique : de nombreux autres rongeurs peuvent montrer des prédispositions génétiques sur certaines lignées aux pathologies dentaires. Celles-ci sont nombreuses, on peut retrouver des malformations au niveau du crâne ou des dents.
- Atteinte traumatique : il est possible que par accident, des dents soient délogées ou déviées par atteinte traumatique, ce qui interfère avec l’usure naturelle. Ceci peut être dû à des morsures, chutes ou encore tout simplement par le fait que l’octodon ronge ses barreaux par ennui.
- Stress : L’Octodon degus est sensible aux bruits ou odeurs fortes, ou avoir trop chaud ou trop froid selon l’environnement dans lequel il se trouve. Ces conditions provoquent un stress psychologique et physiologique. Le stress réduit la force des ligaments parodontaux, qui maintiennent les dents dans leurs alvéoles. La qualité des ligaments et des gencives est également affectée, les blessures se produisant plus facilement chez les individus stressés9.
Symptômes
Radiographie du crâne d’un octodon degus avec malocclusion dentaire – Photo par Isabelle Wornham
Les symptômes de problèmes dentaires chez l’octodon peuvent passer inaperçus assez facilement. En effet, il est possible que le degu présente une petite perte de poids sur une longue période, ou présente des symptômes qui mènent à d’autres pistes, notamment respiratoires. Il est donc indispensable de bien contrôler l’état de son octodon pour pouvoir détecter rapidement les problèmes dentaires.
Parmi les symptômes les plus communs, on retrouve7 :
- Perte de poids : l’un des premiers symptômes de nombreux problèmes de santé est une perte de poids, assez prononcée et durable. Il est recommandé de peser ces octodons toutes les semaines, afin de pouvoir suivre leur courbe de poids.
- Pousse excessive des incisives : si la pousse des incisives est en soi une pathologie dentaire, cela peut résulter d’autres problèmes de santé, ne permettant pas à l’octodon de s’user les dents correctement. Celles-ci peuvent être trop longues, de tailles différentes ou pousser de travers.
- Masse autour et sous la mâchoire : cela peut être un signe d’un problème dentaire. Il est possible que l’octodon développe un odontome ou une masse cancéreuse liés à des frottements répétés des tissus.
- Difficulté à la mastication : si l’octodon a de nombreuses difficultés à mâcher, ou “s’étrangle” durant son nourrissage, il est possible que quelque chose le gêne au niveau de sa dentition.
- Bave / hypersalivation : un animal qui se met à baver peut avoir des problèmes dentaires, mais également de nombreux autres problèmes de santé.
- Difficulté à se nourrir : l’octodon peut avoir de nombreuses difficultés à se nourrir, et peut rester prostré près de la nourriture, ou la prendre et la laisser tomber.
- Écoulement nasal / oculaire : un “rhume”, ou un octodon qui “pleure” peut résulter d’une infection ou perforation de la mâchoire liée à un problème dentaire15.
- Difficulté à respirer : il est possible qu’une trop grande pousse des dents empêche l’animal de respirer correctement, ou le gêne, pouvant entraîner des surinfections pulmonaires.
- Pelage sale, ou mal entretenu : cela peut être le signe d’une douleur ou d’une difficulté à utiliser sa langue pour entretenir correctement son pelage13.
- Arrêt du transit : qu’il soit global ou partiel, l’arrêt du transit peut être lié à des problèmes.
- Dents blanche, ou jaune pâle : le blanchissement des dents chez l’octodon est le signe d’un déséquilibre dentaire et peut également être lié à d’autres pathologies.
Diagnostique

Illustration par Vurorologie
À chaque suspicion de problème dentaire, l’octodon doit être conduit chez un vétérinaire compétent afin de poser le diagnostic13. Pour cela, il sera très souvent nécessaire de procéder à un ou plusieurs examens cliniques. Il est d’abord possible de vérifier l’état des incisives et de palper le crâne afin de déceler la moindre masse suspecte. Il est nécessaire que le vétérinaire réalise une imagerie complète de la tête, afin d’éviter de passer à côté de pathologies encore précoces.
L’un des moyens les plus utilisés pour déceler les malocclusions est la radiographie. L’animal est alors anesthésié et des radios de son crâne sont prises sous différents angles afin de vérifier la pousse des prémolaires et molaires. La tomographie assistée est également un bon moyen de détecter le moindre problème, notamment pour les couronnes des molaires. Cependant, il est également intéressant pour le vétérinaire de procéder à un examen intrabuccal, pour ne pas manquer d’autres lésions, comme les maladies parodontales, les caries ou les résorptions dentaires. Il est possible de réaliser ces examens via endoscopie4, afin de pouvoir déceler ces pathologies dentaires, qui ne sont pas toujours visibles par radiographie. Enfin, un examen “manuel” doit également être fait par le vétérinaire, via l’observation et la palpation du crâne de l’octodon, afin de déceler de possibles pathologies et de vérifier l’état des incisives et de la bouche.

O’Toole, octodon degus ayant des problèmes dentaires – Photo par Alex Wallace
Traitements
Il existe plusieurs méthodes pour soigner son octodon. Celles-ci requièrent presque toutes un acte chirurgical, sous anesthésie générale. Selon le diagnostic, le vétérinaire devra traiter l’octodon de la manière la plus adaptée. Il est possible de simplement limer les dents dans les cas de malocclusions les plus simples, mais aussi de retirer des masses cancéreuses … Seul un vétérinaire est à même de poser le diagnostic et d’en choisir le traitement adapté. En plus de l’acte sous anesthésie, il est possible que le vétérinaire apporte un traitement antibiotique, analgésique ou encore un soutien nutritionnel. Malheureusement, il n’est pas possible de régler de façon permanente les pathologies dentaires, d’où la nécessité d’un contrôle régulier pour éviter les rechutes, ainsi qu’une bonne gestion de l’alimentation.
Pathologies & troubles dentaires chez l’Octodon degus
Trouble des incisives
Troubles des incisives chez les degus (Vladimir Jekl).
(A) Allongement et dépigmentation de l’émail des couronnes cliniques.
(B) Malocclusion sévère et déviation de l’incisive mandibulaire droite après une blessure traumatique.
(C) Déviation latérale droite iatrogène de l’incisive mandibulaire et allongement coronal global après le détourage des couronnes cliniques avec une pince.
(D) Déplacement et malocclusion des incisives secondaires à un mélanome maxillaire.
Malocclusion
La malocclusion des incisives est la pousse excessive de ces dernières, ou une pousse irrégulière, ne permettant plus de mouvement d’usure naturel.
Il s’agit de la malocclusion dentaire la plus facile à appréhender, car elle est directement visible. Cette pathologie vient de l’élongation des incisives, ou d’une pousse irrégulière, “tordue” de ces dernières. Les pathologies liées aux incisives et tout particulièrement les élongations coronaires peuvent être liées à une mauvaise alimentation et aux malocclusions des molaires et prémolaires dans la bouche.
Autres pathologies
L’octodon peut également développer d’autres pathologies des incisives que la malocclusion. En effet, il est possible de rencontrer des pathologies telles que la dépigmentation, l’hypoplasie de l’émail (l’octodon a alors les dents blanches), les crêtes sur l’émail, ou les déminéralisations du cément ou de la dentine. Ces pathologies sont dues à des troubles du tissu germinal, liés à des déséquilibres métaboliques. Ces derniers sont souvent dus à un mauvais régime alimentaire, à des maladies systémiques ou encore à des traumatismes (accidents, morsures, ….). Il est donc important de vérifier régulièrement l’état des incisives de son octodon.
Le blanchissement des dents est également le signe d’un déséquilibre alimentaire important et nécessite une révision de l’alimentation globale. De manière générale, l’octodon doit avoir les dents oranges, si elles pâlissent ou deviennent jaune, cela est le signe d’un début de blanchissement. Si l’octodon a les dents blanches depuis un certain temps, il est très important de vérifier l’état global de la mâchoire afin d’éviter de passer à côté d’une autre pathologie dentaire liée.
Troubles des prémolaires ou molaires
Images CT du plan sagittal de l’arcade dentaire maxillaire reconstruite en modèle 3D, vue médio-latérale médiolatérale (A), et reconstruction de surface (B).Ll’allongement apical et la couronne de réserve de la quatrième prémolaire ont fait éruption dans la cavité nasale (A), avec un apex bombé dans l’os nasal (B). Structure irrégulière suggérant des changements dysplasiques de la dent structures. Les images reconstruites sont visualisées en utilisant le logiciel de rendu de volume Drishti. (Vladimir Jekl et Tomas Zikmund).
Malocclusion
Les malocclusions dentaires des prémolaires ou molaires sont la pousse excessive de ces dents, pouvant aller jusqu’à l’étouffement de l’animal ou la perforation d’os de la mâchoire.
Les malocclusions dentaires, notamment celles touchant les prémolaires et molaires sont très courantes chez les rongeurs, et majoritaires chez l’Octodon degus. Chez les chinchillas, les malocclusions semblent être liées à des causes nutritionnelles et génétiques qui sont les facteurs dominants aux pathologies dentaires. En captivité, les octodons ont tendance à avoir des dents plus longues que dans la nature. Cela est lié à la mastication réduite, notamment à cause de la nourriture industrielle, non adaptée et moins abrasive. Chez l’octodon, les déséquilibres alimentaires et le manque de calcium, avec un ratio Ca:P de 1:1 induit des malocclusions de toutes les dents en à peine 6 mois!3 De plus, cela réduit également la densité osseuse de certaines parties de leur corps. C’est la pousse excessive des prémolaires et molaire qui cause la plupart des signes cliniques associés aux maladies dentaires chez les octodons. L’élongation de ces dents peut entraîner notamment des douleurs, liées à la pression des dents sur les terminaisons nerveuses. De plus, il est possible que la dent pousse à travers des tissus et abime ainsi la région buccale, ou perfore des zones osseuses, comme l’os nasal ou frontal15. Il est alors possible de sentir des irrégularités durant la palpation des zones externes de la mâchoire.
Radiographie latérale du crâne d’un degu qui a été présenté avec une dyspnée. Les radiographies montrent une grave élongation coronale et des déformations apicales des prémolaires/molaires avec formation d’une pointe de la couronne clinique d’une prémolaire mandibulaire (flèche). Les apices malades de toutes les dents de la joue sont clairement visibles (lignes rouges). L’anomalie radiographique apicale d’une prémolaire maxillaire indique un changement dysplasique (pseudo-dontome, bleu). L’examen histopathologique a confirmé la présence d’un pseudo-dontome de la prémolaire et d’un élodontome dans la cavité nasale. (Vladimir Jekl)
Autres pathologies
Avec une mastication perturbée, il est possible que l’octodon ait des problèmes de déglutition ou développe des dysphagies prononcées. Les couronnes des molaires ont également tendance à s’allonger chez l’octodon, souvent en direction de la langue. Il est alors possible que les dents “coincent” la langue dans les cas graves, avec la formation d’un “pont” dentaire.
Maladie parodontale
La maladie parodontale attaque et détruit les tissus qui permettent de soutenir les dents, comme la gencive et les os16. Il s’agit d’une maladie d’origine bactérienne, qui se développe lentement, parfois sur plusieurs années.
Peu étudiée chez l’octodon, il s’agit d’une maladie très courante chez le chinchilla, qui reste une espèce assez proche. Il est donc possible que cette maladie, qui touche 63% des chinchillas, soit également présente chez le degu17. Cette maladie est liée à divers facteurs comme : une autre pathologie dentaire, des facteurs génétiques, l’âge, la microflore orale et la nutrition. Une maladie parodontale non traitée progressera et entraînera une résorption osseuse et dentaire.
Résorption dentaire
La résorption dentaire est la disparition progressive, physiologique ou pathologique, de la couronne et/ou de la racine d’une dent.
Cette pathologie entraîne chez l’octodon la perte des couronnes cliniques des prémolaires et molaires. Cela impaction fortement la mastication et l’alimentation. La perte de la dent induit un vide où les restes de nourriture peuvent se loger, créant ainsi d’autres pathologies (caries, maladie parodontale). La résorption dentaire peut aussi créer une malocclusion de par le manque d’usure de la dent opposée. Cette affection est une source de douleur intrabuccale chronique, entraînant une prise alimentaire réduite et insuffisante suivie d’une perte de poids et de complications métaboliques potentielles telles que l’acidocétose (complication liée au diabète) et la lipidose hépatique (sorte de jaunisse). Par conséquent, degu présentant des signes cliniques et des symptômes évocateurs d’une maladie parodontale doit être évalué et traité de manière appropriée.
Caries
Les caries dentaires sont la déminéralisation et destruction de la dent après une infection bactérienne. Cela advient lors de la production d’acide lactique par les bactéries cariogènes18. Présente chez de nombreux chinchillas, plus de 50% des rongeurs en captivité, la carie peut également affecter l’octodon. Encore une fois, l’alimentation est remise en cause. Les taux de saccharose élevés, ainsi que le manque de mastication longue entraîne la formation de caries. En effet, une mauvaise mastication peut entraîner une augmentation de la formation de plaque sur les dents et une réduction de la salivation. De plus, les malocclusions dentaires des molaires et prémolaires entraînent elles aussi l’accumulation de plaque bactérienne, liée aux caries17.
Troubles des prémolaires et molaires chez les degus.
(A) Allongement coronal avec formation d’éperons de la première dent de la joue mandibulaire droite.
(B) Allongement coronal bilatéral de la première dent prémolaire mandibulaire, avec formation typique d’un éperon mandibulaire, d’un “pont” et piégeage ultérieur de la langue. (Vladimir Jek)
Néoplasie et lésions cancéreuses
Les tumeurs buccales les plus courantes chez l’octodon sont les élodontomes19. Ils sont définis comme un hamartome de tissu odontogène et d’os alvéolaire en développement continu au niveau du bourgeon périapical des dents élodontes2021. Pour faire simple, une grosse masse de tissus qui se développe dans la zone du crâne. Ces lésions sont liées à des traumatismes, inflammations, à l’âge ou à d’autres maladies dentaires, notamment les malocclusions. L’espérance de vie d’un octodon atteint de ce genre de pathologie oscille beaucoup, avec une moyenne de 6 mois, avec traitement palliatif et alimentation assistée.
Les autres tumeurs observées dans les cavités buccales des degus comprennent le mélanome et le fibrosarcome22. Enfin, l’octodon peut développer des “pseudo-odontomes”, (lésions pseudo-néoplasiques) suite au dépôt continu de structures dentaires, créant ainsi une masse. Malheureusement, cette masse peut obstruer la cavité nasale, provoquant une détresse respiratoire intermittente ou chronique légère à sévère20.
Radiographies latérales obliques Lt 10 V – Rt D du crâne d’un degu présentant une malocclusion des incisives (incisives mandibulaires surlignées en jaune), une élongation apicale des incisives mandibulaires et prémolaires et molaires (apices surlignées en rouge). Dans ce cas, les problèmes respiratoires étaient associés à une masse radio dense correspondant à un élodontome (bleu), qui obstruait la cavité nasale. (Vladimir Jek)
Abcès dentaires
Les abcès sont des amas de pus dans une cavité du corps.
Chez les octodons, ceux-ci peuvent être liés à des infections primaires (liées à une bactérie) ou secondaires. Ces dernières peuvent avoir plusieurs causes, comme des traumatismes (morsures, échardes, …) ou d’autres maladies dentaires. Ils peuvent se développer autour des dents et dans les tissus mous pour les plus importants. Il n’est pas rare que les abcès dentaires soient liés aux malocclusions. Dans ce cas, il faut différencier23si ceux-ci se forment à la base de la dent et sont alors liés à la pénétration de la racine dans des tissus ou s’ils se forment dans les tissus mous, à cause d’une élongation des couronnes dentaires. Ces différents abcès doivent être pris en charge de manière adaptée, afin de soigner correctement l’octodon.

Tipi qui mange du pissenlit
Conclusion
Afin d’éviter au maximum les pathologies dentaires si courantes chez l’octodon, il convient de bien contrôler son alimentation. D’une part en lui proposant un régime adapté, avec un taux de Calcium:Phosphore d’au moins 1,6:1, à hauteur de 20%17, mais aussi de nombreuses plantes, sèches ou fraîches, afin de permettre une mastication optimale, à hauteur de 80% du régime. Afin, un apport régulier en vitamine D est indispensable pour veiller à la bonne santé du dégu. Pour en savoir plus, vous pouvez lire notre article sur le sujet : Comment nourrir son octodon ? SAB degu mix.
Sources
- Diseases in pet degus: A retrospective study in 300 animals[↩][↩]
- Impact of pelleted diets with different mineral compositions on the crown size of mandibular cheek teeth and mandibular relative density in degus (Octodon degus)[↩][↩]
- Impact of a high-phosphorus diet on the sonographic and CT appearance of kidneys in degus, and possible concurrence with dental problems[↩][↩][↩]
- Anatomy and Disorders of the Oral Cavity of Chinchillas and Degus[↩][↩][↩][↩]
- Early postnatal physical and behavioural development of degus (Octodon degus)[↩]
- Dental eruption chronology in degus (Octodon degus)[↩]
- Chinchilla and Degu Health Care – Thryv[↩][↩][↩]
- Elodontoma in a Degu (Octodon degus)[↩]
- Dentistry in Hypselodont Small Animals: Guinea-pigs, Degus and Chinchillas[↩][↩][↩]
- Feeding Ecology of Two Chilean Caviomorphs in a Central Mediterranean Savanna[↩]
- Vitamine D : effets osseux et extraosseux[↩]
- Nutrition and Behavior of Degus (Octodon degus)[↩]
- Ferrets, Rabbits, and Rodents Clinical Medicine and Surgery by Katherine Quesenberry, Christoph Mans, Connie Orcutt[↩][↩][↩][↩]
- Contribution à l’étude des affections bucco-dentaires chez les rongeurs et lagomorphes domestiques[↩][↩]
- Dyspnea in a Degu (Octodon degu) Associated with Maxillary Cheek Teeth Elongation[↩][↩]
- La maladie parodontale – UFSBD[↩]
- Dental disease in chinchillas in the UK[↩][↩][↩]
- Caries and odontoclastic resorptive lesions in a chinchilla (Chinchilla lanigera)[↩]
- Elodontoma in a Degu (Octodon degus)[↩]
- Dyspnea in a Degu (Octodon degu) Associated with Maxillary Cheek Teeth Elongation[↩][↩]
- Odontoma-like Tumours of Squirrel Elodont Incisors—Elodontomas[↩]
- Skull size and cheek-tooth length in wild-caught and captive-bred chinchillas[↩]
- Diagnosis, treatment and prognosis of dental disease in pet rabbits[↩]